Au-devant des autres navires
La Méduse avait quitté sa route
Sécession présageant le pire
Une désastreuse déroute
Échoués au large
Les naufragés abandonnèrent le bateau
Certains portés par des rames
D'autres sur le funeste radeau
Tels les vagues de la mer battue par les vents
Se brisant dans leur course au-dessus de l'abîme
Ils devaient être l'objet de mille tourments
Entre les planches et les voiles de la terrible machine
Parmi les malheurs qui affligèrent
Ces infortunés humains
Souvenez-vous que c'étaient leurs frères
Qui avaient scellé leur destin
Le radeau remorqué vers le rivage
Est dépendant du soutien illusoire
D'alliés qui larguèrent les cordages
Rompant ce lien garant d'espoir
Maudits par leur nom leurs visages changés en pierre
Comme si la gorgonne avait paru devant eux
L'hostilité primitive sur eux se resserre
Sous les plus sinistres cieux
Deux fois condamnés
Par deux fois bannis
Ces soldats flétris exilés sur les mers
Rattrapés par la rancune d'implacables furies
À nouveau prisonniers de l'enfer
La soif les dévora bientôt redoublée par les dards du solei
Leur peau écorchée par l'eau salée les privant de sommeil
Le compte des noyés enlevés par la détresse et les tempêtes
Rythmait les jours passés sur ce plancher étroit et précaire
La faim leur a fait trancher la chair de leurs compagnons morts
Se nourrir de ce consternant augure de leur propre sort
Jetés à la mer les blessés offraient un spectacle absurde
Tout ceci n'étant rien comparé aux déchaînements de violence nocturne
Un par un la folie fit d'eux ses esclaves
Frêles échos de la fureur des vagues
La peur primordiale soufflant la forfaiture
Remontant des profondeurs obscures
Tels les vagues de la mer battue par les vents
Se brisant dans leur course au-dessus de l'abîme
Ils ne restèrent que quinze sur bien plus de cent
Sauvés du supplice de la terrible machine
Bien que les maux ne prirent pas fin
Pour ces épaves affligées de douleur
Souvenez-vous de leurs frères humains
Qui sauvèrent leur vie, leur rendirent leur valeur